Cythara-Martine Gercault
Artiste Peintre
BIOGRAPHIE
J'ai toujours été attirée par la vibration des couleurs et l'onirisme de l'abstraction.
L’art fit toujours partie de ma vie tant extérieure qu’intérieure.
Je me suis occupée, dans les années 70-80, d’une galerie d’art, la « Galerie du Centre » près du musée Pompidou, où furent exposés Hélion, Lanskoï, Poliakoff, Attila, Dimier, Atlan, Hartung, et d’autres peintres abstraits lyriques de la Nouvelle Ecole de Paris.
Également psychothérapeute et art-thérapeute, c'est tout naturellement vers la liberté gestuelle et intuitive que vous emporte mon art. Au-delà du visible. Mes toiles sont le reflet d'une métamorphose et d'une irruption créatrice porteuse de sens et de vie, au-delà de la compréhension intellectuelle. La source a surgi du chaos, libérant des forces originelles insoupçonnées. La terre et les eaux se sont ouvertes, le ciel s'est éclairci et la femme de feu a pu enfin retrouver son âme sauvage, enfin libérée.
Peindre en état de conscience élargie, les « outils » scandés par la musique et la voix.
Les états non ordinaires de conscience rencontrés par des techniques de jeûne, de respiration contrôlée, le tambour chamanique, la danse et les plantes entéogènes permettent l’accès à des inscriptions psychiques très anciennes que Jung nommait le Soi ou archétype de la totalité. Se substituant à cette notion du « Soi », nous pourrions également évoquer l’inconnu, l’invisible, le vivant.
L’induction opérée par la scansion régulière et répétitive du tambour chamanique initie l’ouverture nécessaire au processus artistique. Cette « monture » sonore permet au sujet qui voyage de rentrer en contact avec son inspiration et les forces telluriques de l’Univers. Ce dialogue entre le moi et le soi qui part du corps est vécu comme un axe, une structure matière-énergie, une conscience primordiale qui nous resitue au centre de nous-même et du cosmos.
Cette présence du tambour opère comme un rituel de dé-liaison du monde profane pour réorienter et réorganiser nos forces créatrices.
Nous pouvons alors nous emparer des pinceaux, des couleurs et matières pour inscrire et injecter sur la toile du symbolique, du ludique, du magique, du pulsionnel et toutes sortes de thématiques invisibles et « intouchables » en état de veille. Le corps alors danse, exulte, l’esprit se libère laissant place à une émergence énergétique refoulée qui va alors pouvoir s’organiser spontanément, transformant l’acte de création en une ardeur de vie retrouvée.
Comment est né en moi l’acte de peindre ?
Vous allez le découvrir en lisant cette drôle d’histoire ! " Le pinceau chamane ou le réenchantement "
Il parle d’une mésaventure personnelle qui, par la suite, se transforma en une très belle aventure, dans l’expérience et le vivant.
En effet, cette naissance alchimique qui se mit soudainement à l’œuvre fin novembre 2007, débuta dans les cendres quelques jours après une folle agression à main armée dont je fus victime à mon domicile, perpétrée par trois hommes masqués, déguisés en postier, qui firent irruption chez moi lorsque j’ouvris la porte.
Pendant un temps qui me sembla infini, l’un d’entre eux colla un revolver contre ma tempe gauche tandis que les deux autres fuyaient vers l’arrière de l’appartement. Je fus alors comme foudroyée, pulvérisée, cristallisée puis dissociée, une « partie de moi s’en alla », très loin.
Cette effraction violente créa en moi une explosion intérieure qui eut pu être délétère si n’avait alors surgi, dans l’après-coup, cette mise en mouvement créatrice qui m’anima, et certainement me restaura. Les formes, les couleurs et les sons jaillirent spontanément.
Peindre fut alors un mode privilégié pour me réintégrer et me resituer dans le monde des vivants. Cette proximité avec la création distilla en moi une secrète fascination pour cet univers des formes qui, depuis toujours, m’a semblé surgir d’une Source ne pouvant être atteinte en états de conscience ordinaire.
Les couleurs et les formes ont commencé à fuser dans un état qui n’était pas mon état habituel. Souffrant d’un état d’anesthésie émotionnelle, et figée dans une sorte d’inquiétante étrangeté, il me fallait me ramener « ici et maintenant » au risque alors de demeurer morcelée.
Praticienne du chamanisme, j’ai alors pris, un soir, mon tambour, contacté mes animaux totem pour œuvrer au rapatriement des fragments de mon être qui s’en étaient allés.
Puis, poussée par une incontrôlable force, je pris des pinceaux, des couleurs, une toile, et laissai ma main courir sur le support. Celle-ci se déplaçait avec fièvre, dans une danse frénétique. Les couleurs, je ne les choisissais pas, elles s’imposaient.
Ce pèlerinage de l’âme que je débutai alors, m’emmena dans des espaces que je n’avais jamais visités. Se sont alors créés des chemins permettant aux forces créatrices d’opérer.
Les tableaux réalisés tracèrent peu à peu une cartographie pour me sortir de ma confusion réactionnelle à l’agression armée.
Je n’avais jamais eu le projet de peindre, je n’avais jamais appris. Je ne sais toujours pas tenir un crayon ! Tout se tissa de manière informelle, dans une totale inconscience de moi, dans une totale absence à moi-même. Je n’avais plus d’identité, plus d’ego, « ça » se faisait sans moi, mais à travers moi, dans une révélation qui me laissait face au mystère. Je m’effaçais, et m’efface toujours pour que des couleurs et des formes apparaissent.
L’invisible devient visible, des forces se lèvent et passent à travers moi. Je reprends à mon compte ce qu’écrit le poète visionnaire William Blake
« Je ne fais rien, l’Esprit Sacré accomplit tout à travers Moi ». J’appris à me tourner vers le seul Dieu, la seule force en laquelle je pouvais croire, celle de la créativité, que Dylan Thomas a nommée « la force qui, à partir du bourgeon, conduit à la fleur ». J’appris à me tourner vers la toile, sans projet aucun, vide, pour faire en sorte que cette force créative opère en moi. Je me suis retrouvée dans ce qu’écrit Mondrian : « La position de l’artiste est humble. Il est essentiellement un canal ».
Je comprends maintenant encore davantage que tout ce qui surgit dans notre vie est vecteur de sens. Rien n’arrive par hasard !
Sans cette ouverture forcée de mon appartement, aurais-je cédé au plaisir de la création ? Je ne crois pas. Ayant un sens très marqué de l’esthétique, je n’aurais certainement pas osé. Il me fallait être acculée pour réveiller cette force latente ensevelie.
Cette effraction, je la vis dorénavant comme une métaphore magnifique de cette ouverture qui devait se faire en moi dans la douleur.
Le monde invisible s’était manifesté à moi pour qu’enfin j’abandonne mes résistances tout en me protégeant.
Mes premiers tableaux, d'une matière épaisse très travaillée où la gestuelle mise en œuvre remplace le sujet de la peinture figurative, donnent la primauté aux formes, aux couleurs et aux lumières, sans partir d'un sujet préétabli. On y ressent un certain primitivisme de la forme et de la couleur, inspiré des arts premiers, et certainement de mon propre travail auprès de chamanes amérindiens et mexicains, à l’appui du tambour et des plantes maîtresses dites enthéogènes.
Le chamanisme est la plus ancienne méthode permettant d’utiliser les états de conscience modifiés pour trouver des solutions à nos difficultés et les soigner. Il y a plus de trente mille ans les chamanes furent les premiers guérisseurs. Conseillers spirituels, sages et visionnaires, ils étaient et sont toujours panseurs et passeurs d’âme, intermédiaires entre le monde des esprits, les forces de l’univers et notre monde visible dit monde du milieu. Le chamane développe un pouvoir intérieur pour surmonter le chaos, non pour s’y complaire et ce, le plus souvent après avoir vécu lui-même une phase de démembrement. Il redonne au groupe le savoir rapporté de l’au-delà pour guérir le corps et l’esprit, et régénérer l’ordre public. Il est un médiateur, un intercesseur entre le monde des humains et celui des esprits.
Tout l’art chamanique (guérison, confection des objets et des vêtements, culture, action sur les conditions atmosphériques etc…) repose sur la force d’âme, l’aide des esprits et les ressources intérieures si souvent déshumanisées et asservies à l’ordre industriel. Le chamanisme écrit Eliade est
« un processus de sacralisation de la réalité, un phénomène religieux de Sibérie et d’Asie Centrale, des techniques archaïques de l’extase ». Aujourd’hui, le chamanisme connaît une renaissance dans le monde occidental. Nombreux sont les sujets, en quête de racines perdues, de méthodes alternatives de guérison ou d’un sens à donner à leur vie, qui se tournent vers la sagesse et le savoir ancien des chamans.
Beaucoup trouvent dans le chamanisme, notamment dans son lien étroit avec la nature et sa vision du monde, un réconfort permettant de mieux vivre et de trouver un nouvel équilibre.
L’état de conscience modifié nécessaire pour effectuer un voyage chamanique est généralement atteint à l’aide du son d’un tambour frappé à un rythme régulier. D’autres instruments musicaux, des chants ou des danses peuvent également être utilisés pour entrer dans cet état de conscience non ordinaire qui permet de contacter l’invisible et de tirer de cette expérience un mieux-être et des enseignements pour notre réalité quotidienne.
Tout acte créateur est expression libre de soi. C’est en exprimant son unicité, sa liberté et sa vérité que l’Homme prend le risque de devenir créateur. Mais chez nombre d’entre nous, l’exercice de cette expression a trop souvent été oblitéré au seul bénéfice de la pensée rationnelle occidentale et du savoir académique. Faire surgir “quelque chose” ex nihilo, imaginer, inventer, construire – être créatif - ne peut s’actualiser s ‘exprimer pleinement que si nous devenons plus conscients des infinis possibles qui sont à notre portée et dont nous sommes tous porteurs dès notre naissance.
Par ailleurs, l’élargissement de notre liberté de penser et de dire - condition d’accès à la créativité - implique la révision de croyances et d’habitudes et l’abandon des conditionnements. Bref, un changement de paradigme.
L’Homme est un tout. Il est corps, esprit, pensée... C’est à ces niveaux multiples de l’être qu’il est nécessaire d’envisager le changement. Désactiver les mécanismes réducteurs qui inhibent notre créativité est nécessaire. Cependant, renoncer à d’anciens schémas de pensée et de comportement va provoquer un certain chaos, un dérèglement salutaire préfigurant le processus même de la création. S’inspirant du modèle cosmogonique, Kandinsky le résume ainsi :
« Chaque oeuvre naît, (du point de vue technique), exactement comme naquit le cosmos... Par des catastrophes qui, à partir des grondements chaotiques des instruments, finissent par faire une symphonie que l’on nomme musique des sphères. La création d’une oeuvre, c’est la création du monde. »
L’ordre vient du chaos dit-on dans les sociétés initiatiques. « Ordo ab chao ».
La création devient ainsi un voyage aventureux vers l’inconnu. Solitaire mais en confrontation avec le monde. Avec l’autre. Cet autre qui nous interpelle. Qui parfois nous bouscule et nous invite à nous changer. A nous créer. Cet autre qu’en nous-même nous hébergeons, mais qui, malheureusement peut-être jamais, n’émergera si nous n’acceptons pas de rendre les armes pour nous en remettre au Divin Créateur en nous.
Alors point n’est besoin d’un savoir académique car selon Pollock :
« Les peintres aujourd’hui ne sont plus obligés de chercher un sujet hors d’eux-mêmes… Ils travaillent de l’intérieur »
Il en conclut que « de nouveaux besoins appellent de nouvelles techniques. » « Les peuples et le génie primitifs ont un accès plus direct à leur inconscient que les peuples soit disant civilisés. Il faut comprendre que l’inconscient est le facteur créatif, la source et le réservoir de toute connaissance passée et à venir »
Nous portons en nous les mythes, les archétypes, et les incarnons suivant les différents moments de notre vie. J’ai été habitée longtemps par le feu et les entrailles de la terre. Les tableaux que vous allez voir en témoignent. Le feu, symbole de transformation et de purification, s’est généré sur mes toiles. Conflagration, cataclysme quasi total engendré par la force de renouvellement des pulsions de vie. Dialectique de la destruction et de la création.
« Il fut jadis un temps où les dieux existaient, mais non les espèces mortelles. Quand le temps que le destin avait assigné à leur création fut venu, les dieux les façonnèrent dans les entrailles de la terre d’un mélange de terre et de feu et des éléments qui s’allient au feu et à la terre ». Platon, Protagoras 320.321 c
Merci à Stanislav Grof, chercheur infatigable, explorateur de la Conscience, phare et enseignant hors pair, sans qui la Réalité ne serait que ce qu’elle est et qui me mit sur ce chemin. Rencontre essentielle.
Merci à Bach et Schubert qui me portent vers les cîmes.
Merci à ”Ceux “qui, visibles et invisibles, guident mes mains.
Merci à l’Univers et à la vie.
Merci à mon Père, qui a rejoint la Lumière le 10 novembre 2006. Qu’il reçoive tout mon amour. Je lui dédie ce travail.
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